Inclure par l'art - Normativités, handicaps, pédagogie

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Inclure par l’art - Normativités, handicaps, pédagogie

Lieu : LEST (salle 1) - 35 Avenue Jules Ferry 13626 Aix en Provence Cedex 01
 

Journée d’études organisée par Etienne Beylot (CNAM), avec la collaboration de Giuseppe Di Liberti (CGGG) et Philippe Vitale (LEST), le 1er Juin à Aix-en-Provence.

 

De nombreux évènements artistiques, associant professionnels de l’art et enfants désignés handicapés, ont vu le jour ces deux dernières décennies. Au sein du champ de l’éducation, de nombreux « projets » artistiques sont menés, produits des programmes d’éducation artistique et culturelle à l’égard de populations « éloignées » des mondes de l’art et de la culture (Eloy & al ; 2021). Ces projets semblent toutefois se différencier d’une volonté de démocratisation culturelle et souhaitent plutôt se rapprocher des spécificités du public, faisant ainsi la part belle aux notions de « créativité », d’ « imaginaire », d’ « expression de soi », d’ « authenticité » (Gardou ; 2012). En s’adossant à la critique des prises en charge paternalistes (Zafiropoulos ; 1981), qui suggèrent que l’exclusion des enfants dits handicapés mentaux est le produit de l’imposition de programmes et de procédures standardisés niant la diversité des fonctionnements humains, l’activité artistique semble, a contrario, être disposée, « par nature » (Passeron ; 1991), à répondre aux objectifs de la logique inclusive en s’attachant à s’adapter aux singularités de chacun, et à libérer l’expression latente d’enfants devenus atypiques (Ebersold ; Dupont ; 2019).

Cette journée d’étude entend s’intéresser en premier lieu à la conception de l’art qui sous-tend la mise en place de ces politiques dites inclusives. Elle entend mettre en perspective une certaine idée de l’art qui émerge au début du XXe siècle, souvent associée à la pureté enfantine (Bonnery ; Renard ; 2013). Cette perception de l’activité artistique sera également discutée au regard des représentations contemporaines du normal et du pathologique (Canguilhem ; 1966) que la figure de l’autiste de haut-niveau incarne aujourd’hui. Si l’enfant dit handicapé ne doit plus être perçu selon sa déficience, mais selon son potentiel caché ( Ehrenberg ; 2020), certains discours se référant aux neurosciences, désireux d’inverser le stigmate, prennent le risque de se teinter d’essentialisme (Davies ; 1994). Des travaux, notamment en sociologie de l’éducation, suggèrent que les discours et les pratiques pédagogiques de l’art centrés autour de la « capacité créative » de l’enfant prennent le risque de nier les supports sociaux sur lesquels reposent les actes qualifiés de « créatifs » (Lahire ; 2019). En renvoyant au « génie » ou bien au « talent » individuel certaines productions, l’enfant « anormal » retrouve une nouvelle forme davantage psychologisée, davantage individualisée aussi (Morel ; 2014).

Références bibliographiques :

  • Bernstein, B., Pédagogie, contrôle symbolique et identités, Laval, Presses universitaires de Laval, 2007
  • Bonnéry, S. & Renard, F. « Des pratiques culturelles contre l’échec et le décrochage scolaires. Sociologie d’un détour. » Lien social et Politiques, (70), 135–150, 2013.
  • Canguillhem, G. Le normal et le pathologique. Paris, PUF, 1966.
  • Davies, R. Le don de dyslexie, DDB, 2012.
  • Ebersold, S., Dupont, H. Evaluation des besoins, importunité scolaire et réinvention de l’inéducable. La Nouvelle Revue. Education et société inclusives, 86, 65-78, 2019.
  • Ehrenberg, A. « L’idéal du potentiel caché. Le rétablissement, le rite et la socialisation du mal », Anthropologie & Santé [En ligne], 20 | 2020
  • Eloy, F. & Al, Comment la culture vient aux enfants : repenser les médiations. Ministère de la Culture - DEPS, 2021.
  • Gardou, C. La société inclusive, parlons-en !, Paris, Eres, 2012.
  • Lahire, B. Enfances de classes, Paris, Le Seuil, 2019.
  • Morel, S. La médicalisation de l’échec scolaire, Paris, La Dispute, 2014.
  • Passeron, J-C. Le raisonnement sociologique, Paris, Le Seuil, 1991.
  • Zafiropoulos, M. Les arriérés : de l’asile à l’usine, Paris, Payot, 1981.